Poèmes en liberté
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Au cœur des saisons

La rosée printanière,
Enivre mon âme.
Cette odeur familière,
Seule, me désarme.

Ces délicieuses soirées d’été,
Enchantent mon esprit.
Je suis comme hypnotisée,
Par ce soleil de nuit.

Tendres jours d’automne,
Où se colore la vie.
Dans un silence monotone,
la nature rougit.

Glisse le froid d’hiver
Et part au loin.
Dégivre ainsi la Terre,
De son chemin.

Sur les flots, vogue mon cœur,
À travers les saisons.
Je cesse de compter les heures,
Et admire l’horizon.

Estelle Dellaroli
Recueil Poésie en liberté 2016

https://www.poesie-en-liberte.fr/au-coeur-des-saisons/
(mise en forme originale disponible sur notre site)

Plic-Ploc

Quand il pleut dans ma douche
Je ne sais pas pourquoi
Ça fait des bruits de bouche
Et puis j’ai un peu froid.
Tic-Toc
Il pleut dans ma tête
Ça rythme mon ennui
C’est comme un jour de fête
Mais étrange la nuit
Plic-ploc

Quand il pleut dans ma douche
Je vois passer le temps,
Je dois avoir l’air louche
En bouchant mes tympans.
Tic-Toc
Il pleut dans ma tête
Ça fait un drôle de bruit
Je me dis : tu es bête
Ou bien c’est la folie ?
Plic-Ploc

Il faudra vivre avec
Humidité ambiante
Et pensées chancelantes
Jusqu’à ce qu’un jour peut-être
Tout redevienne sec


Clara Gervaise-Volaire
in Recueil Poésie en liberté 2016

https://www.poesie-en-liberte.fr/plic-ploc/
L’Âtre de l’humanité

Il y a de cela plusieurs années,
Sinistre survenu sans mise en garde,
Voyant myriade de ses enfants trépasser,
Dieu demanda audience à la camarde.

Fossoyeuse, lui dit-il,
Ne t’ai-je pas traité poliment ?
Ne t’ai-je pas donné mes enfants ?
Comment expliques-tu cet acte puéril ?

La mort, répliqua, consternée,
Cher frère, qu’est-ce, cette pensée ?
Ce sont les offrandes de mon bien-aimé,
Lui, le roi du brasier.

Époux de la faucheuse,
Dieu convoqua.
Et ces questions,
Dieu lui posa.

Qu’es-tu ?

N’es-tu que malfaiteur ?
Souverain de ton bonheur ?
Roi des braises, pleures-tu ?
Toutes les vies gaspillées ?

Pourquoi une telle différence ?
La douce chaleur sur joues nacrées,
Le déchaînement meurtrier ?
Les brûlures de ta colère ?

Que fais-tu ?

De la mort que tu sèmes ?
Des fantômes dans ton sillage ?
T’en préoccupes-tu ?
Réconfortes-tu leurs larmes ?

Ne fais-tu que passer ?
Continuer ton passage ?
Dans l’ombre de ta femme, la faucheuse ?
Sous ma vigilance, celle de Dieu ?

Comment fais-tu ?

Pour créer la liberté ?
Lueurs d’espoir dans le noir ?
Ivresse seulement par une caresse ?
Le soutien nécessaire pour continuer ?

Ne nous as-tu pas fait voyager ?
Portés par ton souffle ?
Découvrir un nouvel horizon ?
Celui de l’imagination ?

Comment décides-tu ?

Les personnes à épargner ?
Celles à soutenir ?
Celles à protéger ?
De tes tisons guerriers ?

Ne choisis-tu pas ?
Les moutons à sacrifier ?
Les corps à transpercer ?
Les soldats à écraser ?

Qui es-tu ?

Le tueur de l’humanité ?
L’amateur de volupté ?
L’ami des démunis ?
L’ennemi des esprits ?

Le déserteur de l’armée ?
Le désiré des femmes ?
L’aimé du peuple ?
L’éclat destructeur ?

Ne me reconnais-tu pas ?
Demanda le souverain de la braise
Dieu, sans hésitation, le tout nia
Jamais pareille cruauté il n’avait su créer

Alors, le roi des flammes
Prit une brève inspiration
Puis répondit à Dieu
D’une voix grave et sans pitié

« Je ne suis que l’homme »


Élisabeth Chouinard
in Recueil Poésie en liberté 2017

https://www.poesie-en-liberte.fr/latre-de-lhumanite/
Retour


Enclos dans notre nom, dans notre ombre,
que faire de plus sinon regarder au loin
dans la brume qui lève ce peu de territoire
que la vie nous a concédé.


Ce serait facile de retrouver nos pas
sur une neige ayant survécu à l’été.
Nous ferions demi-tour pour découvrir
des torrents, des à-pics, tout ce qui n’est plus
qu’apparence mais qui l’emporte sur le réel,
puisque nos marges sont restreintes
et qu’il faut se donner l’illusion
d’avancer un peu plus,
de découvrir des cerisiers en fleur,
un lac sans nom dans la clarté matinale.


Il nous suffit de ne plus rien dire,
de ne plus rien voir et d’entrer dans la nuit
à contre courant, toutefois.


Max Alhau
Anthologie progressive Poésie en liberté

https://www.poesie-en-liberte.fr/decembre-2017-max-alhau/
La maison de l’oncle Vassilis mille
Quatre cents mètres carrés avec vue
Sur la mer un marbre noir du Brésil
« Rare quatre au monde » commente-t-il
Au vibrato je sens qu’il est ému
Nous visitons ensuite la chapelle
Construite au fond du jardin suspendu
Il y mariera sa fille Cybèle
Un petit chien jappe et lèche des joues
C’est un bichon qu’on appelle Bijou


Guillaume Decourt
Anthologie progressive Poésie en liberté

https://www.poesie-en-liberte.fr/mai-2018-guillaume-decourt/
Ce pays accouru

Nous parlons d’un lieu naissant, étrangers à la précision du temps qui nous gouverne.

Nous parlons comme si le silence était cette brûlure, ce chemin du vivant conjurant les ténèbres. Le lieu d’où nous parlons est plus grand que notre courage, plus infini que notre sang.

Les mots sont en retard sur la source qui les fait naître ou en avance. Ils ne font confiance qu’à la sève de leur exil. Il n’y a pas de boue à la semelle de leurs sabots, aucun désastre ne les a précédés, aucun secret.

La sueur perle déjà sur les fronts de solitude. Le bruit autour est un talisman et nous courons après les signes du ciel ignorants du geste accompli, ivres du possible sous le feuillage, libres avant d’être nus. Une main aveugle rompt le destin des corps sans les brusquer, le vide et l’intention sont un seul et même tabernacle plus sûr que la ligne d’horizon. Orpheline et discrète la main reconnaît l’avancée dans la plaine puis achevant son risque au sommet de nos souffles, accourue, elle est cette branche que l’arbre remercie.


Laurence Bouvet
Anthologie progressive Poésie en liberté

https://www.poesie-en-liberte.fr/fevrier-2016-laurence-bouvet/
L’Hiver

L’Automne est passé, avec ses orages et ses pluies averses
L’Hiver arrive avec sa neige et son froid glacial
Ses jours les plus courts et ses nuits les plus désertes
Où la neige recouvre le dessus des voitures
Le bruit de la raclette à glace sur le pare-brise
La fourrure des arbres qui devient blanche
Tout comme le toit des maisons
Des flocons en cascade aux couleurs de la saison
La pluie devient blanche
Pour former un hiver de glace
Où la faune se camoufle dans son refuge
En attendant le printemps et ses couleurs vives
Les cours d’eau qui ruissellent de la fonte des neiges
La nature tombe son manteau blanc qu’elle portait depuis longtemps
À cause d’une saison qui étouffe le temps, l’Hiver.

Maxime Lapié
in Recueil Poésie en liberté 2018

https://www.poesie-en-liberte.fr/lhiver/
Le Rêve

Il fait noir, un noir de nuit d’été;
Ma tête, remplie d’images
Et de voix qui me gardent éveillé.
J’essaie de fermer mes yeux
Mais elles deviennent de plus en plus fortes
Et mon corps, de plus en plus vieux.

Il fait clair, un clair de jour d’hiver ;
Je ne sais pas où je suis.
Aux alentours:
Personne.
Juste une falaise,
Une falaise à perte de vue,
Et un ciel bleu,
Très bleu,
Et une mer profonde,
Trop profonde.

Je m’approche.
Mes orteils s’agrippent au bord
Et je me laisse tomber
Tranquillement.
Le vent me berce,
Dégringolade de caresses.

Je sens l’eau chatouiller mes pieds ;
Elle m’engloutit.
Je me laisse couler,
Sans panique.

J’atteins le fond,
Et je suis en paix.

Je sursaute.
Il fait gris, un gris de vie.


Mathilde Sauvé
in Recueil Poésie en liberté 2018

https://www.poesie-en-liberte.fr/le-reve/
Sur la rive d’enfance embarrassée d’épaves
la mer pétrit le rivage épuisé
et contre ses galets vient amaigrir le jour
qu’un murmure d’embrun confond avec la nuit

Tu n’as pas achevé de célébrer l’aurore
ni ce tracé là-bas de l’horizon
de cette porte ouverte vers un ailleurs
vers une renaissance

Tu n’as pas achevé de veiller
à ce parfum du feu
naissant avec les mots
de l’espérance

Que reste-t-il de toi ?
Les rides sur le lac ne venaient pas du vent
Au bout de ce chemin que ta fuite traça
que reste-t-il de toi ?


Marie Borin
Anthologie progressive Poésie en liberté

https://www.poesie-en-liberte.fr/novembre-2015-marie-borin/
DE QUOI PARLONS-NOUS ?

De quoi parlons-nous ?
De la montagne mélancolie et ses brumes glacées ?
Du légitime secret de nos chambres d’hôtels ?
Du train de nos jours et celui de nos nuits ?
Des lignes de ta main où le livre s’écrit ?
Du regard hygiénique qui lave tout mystère ?
De l’ombre pourchassée par le droit et le fer ?
De l’épaisseur des mots contre les évidences ?
De la bourgeoise obésité et sa peur sacrée ?
De l’aigle d’Alexandre, la croix de Constantin ?
De la colombe de Noé, de celle de Picasso ?
D’un signe dans le ciel brillant par son absence ?
De l’hypocrisie cléricale, la vertu révolutionnaire ?
De ce que je dois faire pour mourir en riant ?
De la puanteur capitaliste monopoliste d’État ?
De la véhémence des paysages métallurgiques ?
D’une lettre morte et d’une autre bien vivante ?
Des larmes qui s’enfuient dans la nuit promise ?
Des fraternités dangereuses des foules insurgées ?


Gérard Mordillat
Anthologie progressive Poésie en liberté

https://www.poesie-en-liberte.fr/avril-2016-gerard-mordillat/
Sous ce climat les sentiments nouveaux
poussent facilement
On se réveille un jour
un temps d’inattention : ils sont là
On les interroge On ne comprend pas bien
Sont-ils nés d’un regard, d’une voix, d’une rencontre ?
On en cherche les prémisses On en traque le sens
Tout semble différent à commencer par soi
Pas de grille d’analyse : il faudra l’inventer
comme l’homme le feu
frottant peau contre cœur
sans répit et sans joie
la science du bonheur.

Karel Logist
Anthologie progressive Poésie en liberté

https://www.poesie-en-liberte.fr/juin-2016-karel-logist/
Le Frigo

L’étincelle lumineuse et l’espoir humain.
Représentant la divinité de la faim.
Mon sang se meurt dans cette fringale éternelle,
Devant la brèche de ce portail virtuel.

Sa charpente brillante et ses éclats d’hiver.
Ce préservateur de la matière organique,
Exhalant l’odeur d’un parfum aromatique
Qui rage en nous portant dans un autre univers.

Souffrant du blizzard et de l’ardent des cuissons,
Sa fraicheur gracieuse projette des frissons.
Célèbre pour sa banque pleine en munitions
Et massacre la souffrance des combustions.

De la viande crue ou des boissons énergétiques.
C’est le seul analgésique qui tue le diable.
Me voilà sauvé par ce frichti exotique,
Fluctuant mon âme dans cette joie ineffable.

Viet Anh Doan Le
Recueil Poésie en liberté 2016

https://www.poesie-en-liberte.fr/le-frigo/
Porte ouverte

Un vent sucré,
De la glace dans ses yeux,
Il ne manque plus que le biscuit,
Croquant. Exquis.

Mais le biscuit est humide,
Le vent devient amer,
La glace a fondu,
Sèche les larmes mises à nu.

Un cœur pur, un cœur simple.
Un homme seul, une femme-épingle,
Maison vide, quelques mains.

Et sur Terre, tristes âmes,
Sifflent les lames, coups de feu, s’enflamment.
Plus de pain, même pas faim,
Un vent doux. Un frisson.
Porte ouverte, guerre de sons.

Karma Armani
Recueil Poésie en liberté 2016

https://www.poesie-en-liberte.fr/porte-ouverte/
Tu as peur de finir ton poème. D’être seul sans lui. Ne t’inquiète pas, rien ne finit. L’en cours est notre éternité. Pour lui, ce matin, tu n’as pas regardé le ciel, sa prairie et la courbe retrouvée du grand alpage sans clôtures.

Pour lui, tu n’as pas regardé les planches dressées près de la porte de l’écurie et qui s’allègent de jour en jour aux intempéries. Tu n’as pas regardé la mare gelée, le perron fendu de glace et d’herbe blanche, le banc, les rochers sous la crête. Les veilleuses muettes et fripées du cynorhodon.

Tu n’as pas regardé les trémières desséchées de l’hiver. Les aiguilles argentées de l’épicéa. Le frêne et son allure toujours aussi lointaine. Le râteau debout contre la porte de la grange. Tu as seulement regardé la page vierge du grand registre.

Joël Bastard
Anthologie progressive Poésie en liberté

https://www.poesie-en-liberte.fr/octobre-2018-joel-bastard/
Extrait du poème Les Marguerites du recueil Poésie en liberté 2021.

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